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Mécanique des fluides appliquée à la voile 

Un bateau est à l’intersection de deux mondes, celui de l’air et celui de l’eau, avec lesquels il doit sans cesse composer : dans l’air, il trouve la force nécessaire à le propulser le plus vite possible, mais également une contrainte à sa progression quand il est mal orienté, voire un ennemi qui cherche à le renverser. Dans l’eau, le bateau trouve l’appui pour ne pas être renversé par le vent, mais également une force qu’il doit vaincre pour se déplacer.

De tous temps, les architectes navals ont donc dû s’intéresser à ces deux éléments, l’air et l’eau, afin de construire le meilleur bateau possible en fonction de leurs connaissances et des technologies disponibles de leur temps. Avec l’évolution de la mécanique des fluides, et de ses deux branches que sont l’aérodynamisme et l’hydrodynamisme, on comprend de mieux en mieux toutes les forces qui s’appliquent à un bateau, comment elles s’additionnent ou s’opposent, et comment les utiliser pour progresser de plus en plus vite. Peu de sports comme la voile exigent une telle variété de connaissances pour appréhender son milieu.

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1.Modélisation des forces appliquées à un bateau

La première force qui s’applique à un bateau est la celle qui s’oppose à son naufrage immédiat : c’est la poussée d’Archimède :

« Tout corps plongé dans un fluide, entièrement mouillé par celui-ci ou traversant sa surface libre, subit une force verticale, dirigée de bas en haut et égale au poids du volume de fluide déplacé ». C’est cette force qui vient équilibrer le poids du bateau et lui permet de flotter.

Les forces aérodynamiques

Pour avancer, un voilier récupère dans ses voiles l’énergie des              forces qui sont dans l’air, dites « forces aérodynamiques » pour les          transformer en une force propulsive dite « poussée ou force vélique ».  Cette force vélique se décompose en :

  • Une force propulsive, dans le sens de la marche du voilier,

  • Une force de dérive, perpendiculaire à l’axe du voilier, qui l’entraîne dans le sens du vent.

Les forces hydrodynamiques

Pour ne pas être emporté par le vent, le voilier s’appuie sur l’eau. C’est ce qu’on appelle la force antidérive : générée par l’écoulement de l’eau sur la quille (ou « dérive ») du bateau, elle s’exerce perpendiculairement à l’axe du bateau (en s’opposant à la force de dérive). Mais pour progresser, le bateau doit ‘pousser’ l’eau qui résiste à son avancement : c’est la « force ou résistance hydrodynamique » qui s’exerce dans l’axe du voilier (en s’opposant à la force propulsive).

- Lorsque la force vélique est supérieure à la force hydrodynamique, le bateau accélère.

- Lorsque la force vélique est inférieure à la force hydrodynamique, le bateau ralentit.

- Lorsque la force vélique est égale à la force hydrodynamique, le bateau avance à une vitesse constante.

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2. Qu'est-ce-que l'aérodynamique de la voile ?

Une voile, c’est comme une aile d’oiseau ou d’avion le long de laquelle l’air circule, et sur lequel le voilier, l’oiseau ou l’avion s’appuie.

Une voile ou une aile se caractérise par son profil, c’est-à-dire la section parallèle à l’écoulement de l’air. Généralement le profil varie d’un bout à l’autre de l’aile ou de la voile. Ce profil se caractérise par :

  • Sa Corde : c’est-à-dire la distance entre le bord d’attaque (à l’avant) et le bord de fuite (à l’arrière).

  • Son Incidence, qui est l’angle formé par la corde et la direction de l’écoulement du vent apparent (vent apparent = cumul du vent réel et du vent relatif lié au déplacement).

  • Son Épaisseur : c’est la distance entre l’Intrados (face inférieure de la voile) et l’Extrados (face supérieure de la voile). Cette épaisseur varie entre le bord d’attaque et le bord de fuite. On distingue l’épaisseur maximale de la voile de l’épaisseur relative (rapport entre l’épaisseur maximale et la corde).

  • Sa ligne moyenne : il s’agit d’une ligne qui court du bord d’attaque au bord de fuite à mi distance de l’intrados et de l’extrados.

  • Sa Flèche : qui est la distance maximale entre la ligne moyenne et la corde. Sur un profil d’aile symétrique, le flèche est donc égale à zéro.

  • Sa Cambrure, qui caractérise spécifiquement les profils asymétriques, et est le rapport entre la flèche et la corde.

A) C'est quoi une voile/aile ?

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Du profil d’une aile découlent des caractéristiques très marquées :

  • Plus l’aile est allongée, et plus un oiseau pourra planer longtemps. Par exemple, les albatros ont des ailes très longues et étroites, d’une envergure pouvant aller jusqu’à 3 mètres et qui, en dépit de leur surface relativement petites, doivent supporter un corps énorme, avec peu de battements d’aile.

  • Plus une aile est cambrée, plus elle va générer de force. Chez les oiseaux à vol rapide comme les hirondelles, l’aile est peu cambrée, alors qu’elle est accentuée chez les oiseaux à vol plus lent. Cette conséquence de la cambrure (appelée concavité dans le graphique ci-après présenté par Manfred Curry) d’une aile est encore plus prononcée lorsque le vent frappe l’aile par en dessous, ou que celle-ci se déplace contre le vent avec une certaine incidence. 

B) Comment ça marche une voile / une aile ?

Le rôle d’une voile / d’une aile est de perturber l’écoulement de l’air de manière à générer une force orientée dans un sens voulu. La forme de la voile est choisie pour que la force vélique soit orientée le plus possible vers l’avant du bateau et qu’elle soit la plus importante possible.

Placé dans un écoulement d’air, un profil génère deux forces :

  • La Trainée, qui est une force parallèle à l’écoulement de l’air et dans le même sens que celui-ci. Elle agit par friction, comme un frein.

  • La Portance, qui est une force perpendiculaire à l’écoulement de l’air et qui s’exerce vers l’extérieur côté extrados. C’est cette force que l’on va chercher à optimiser pour faire avancer le bateau.

 

Comment une aile génère-t-elle de la Portance?

Si on place une voile dans un écoulement d’air, on constate que :

  • L’air à l’extrados de l’aile est contraint de faire une parcours plus long du fait de sa cambrure, donc à une plus grande vitesse. Or, la pression de l’air (dite pression statique) étant inversement proportionnelle à sa vitesse, la pression baisse à l’extrados.

  • Réciproquement, sur l’intrados, la vitesse de l’air est ralentie et la pression s’accroit légèrement.

  • L’air est dévié vers le bas à l’arrière du profil.

Ces trois éléments combinés engendrent une force portante sur l’aile, perpendiculaire à celle-ci et dirigée vers l’extrados. C’est cette force, dite ‘résultante aérodynamique’ ou ‘portance’, qui fait voler des avions et avancer des voiliers.

On l’appelle aussi ‘effet Venturi’ ou ‘effet Bernoulli’ selon lequel la pression d’un fluide diminue lorsque la vitesse de son écoulement augmente. Bernouilli, physicien Suisse du XVIIème,  a découvert que la pression d’un fluide diminue lorsque la vitesse de son flux augmente. Une démonstration commune de ce phénomène est faite en soufflant en 2 feuilles de papier. Comme vous soufflez en les feuilles, celles-ci se collent ensemble, résultat d’une baisse de pression en les 2 feuilles due à la vitesse accrue de l’air induite par votre souffle.

 

L’aérodynamique nous enseigne que c’est la dépression sur l’extrados de la voile qui génère près de ¾ de la résultante aérodynamique, alors que la surpression sur l’intrados n’y concourt que pour ¼. 

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3ème loi de Newton

Relation vitesse / pression d’un courant d’air : Loi de Newton

La dynamique Newtonienne est l’étude du mouvement d’objets macroscopiques se déplaçant à des vitesses inférieures à celle de la lumière. Tous ces principes ont été regroupés dans l’ouvrage « Principes mathématiques de la philosophie naturelle », écrit par Isaac Newton en 1686.

La Première loi de Newton stipule qu'un corps au repos reste au repos, et qu'un corps en mouvement continue en suivant un mouvement rectiligne à moins qu'il soit soumis à l'application d'une force extérieure.

Si on applique ce principe à un flux d’air, ceci signifie que celui-ci est dévié, ou que si l'air à l'origine au repos est accéléré en mouvement, une force y a donc été imprimée.

 

La troisième loi de Newton explique que pour chaque action il existe une réaction opposée de force égale. Par exemple, un objet qui repose sur une table exerce une force sur cette table (son poids) et la table applique une force égale et opposée sur l'objet qu'elle soutient.

De façon à générer de la portance, l'aile doit faire quelque chose à l'air. Ce que fait l'aile sur l'air (déviation) est l'action tandis que la Portance est la réaction.

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Comparons les deux figures ci-dessus pour montrer les flux d'air (ligne de courants) autour d'une aile.

Première figure :

Sur la première figure, l'air arrive en ligne droite sur l'aile, la contourne, et continue en ligne droite derrière l'aile. Mais, l'air quitte l'aile dans le même état qu'il était à l'avant de l'aile. Il n'y a donc pas d'action nette sur l'air, donc il ne peut y avoir de portance (ou très peu).

Deuxième figure :

Dans la seconde figure, présentant une aile avec une certaine incidence, l'air passe au-dessus de l'aile et est dévié vers le bas. La déviation de l'air est l'action. Comme le suggère les lois de Newton, la réaction est la portance de l'aile. Des modifications du moment (*) de l'air résultera des forces sur l'aile. Pour générer de la portance, l'aile doit dévier de l'air vers le bas, beaucoup d'air. La portance d'une aile est égale à la modification du moment de l'air qu'elle dévie vers le bas. La portance d'une aile est donc proportionnelle à la quantité d'air dévié vers le bas multipliée par la vitesse verticale de cet air. Pour obtenir plus de portance, l'aile peut soit dévier plus d'air (masse) ou augmenter la vitesse verticale de cet air.

(*) moment d’une force = grandeur physique vectorielle traduisant l'aptitude de cette force à faire tourner un système mécanique autour d’un point souvent appelé pivot.

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Pour en revenir aux voiliers, la force vélique, c’est la résultante de la traînée et de la portance.

Au près, c’est-à-dire pour des angles de vent inférieurs à 90 degrés, l’objectif du navigateur est de combiner portance et traînée en fonction de l’angle du vent apparent (résultante du vent réel et du vent né de la vitesse) afin d’obtenir une force vélique orientée au mieux (donc vers où on veut aller avec le bateau) et aussi grande que possible.

Le vent arrière est un cas particulier puisque à cette allure la portance ne sert à rien puisqu’elle est perpendiculaire à l’écoulement de l’air et ne fait pas avancer le bateau. Au vent arrière on cherche donc à maximiser la traînée en en plaçant le profil perpendiculairement à l’écoulement de l’air (angle d’incidence de 90 degrés). C’est ce qu’on fait en hissant le spi, voile ‘ballon’ qui ‘capture’ l’écoulement de l’air.

Au portant, c’est-à-dire pour des angles de vent entre 90 et 180 degrés, la traînée et la portance font avancer le bateau. Quand l’angle du vent apparent passe en dessous de 90 degrés, il n’y a plus que la portance qui fait avancer le bateau, car dans ce cas la traînée le freine. Le jeu pour le navigateur consiste donc à créer une portance maximale, mais également à optimiser le rapport entre portance et traînée, ce qu’on appelle la Finesse.

En résumé : la Portance de la voile joue donc un rôle primordial au près pour la force propulsive, alors qu’au portant c’est la Trainée qui génère une force propulsive.

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B) Comment ça marche une voile / une aile ?

Les résultats d’essais de voiles/ailes en soufflerie sont généralement analysés sous forme de graphiques représentant la Portance en fonction de la Trainée pour différent angles de vent apparent. Ces graphiques sont appelés les polaires des voiles. Ils permettent de comparer plusieurs voiles, et de déterminer les points optimums de navigation

Par exemple, sur la polaire ci-contre, on peut remarquer 2 points caractéristiques. Le point 1 est l’optimum en terme de Finesse : c’est le point où la voile est la plus « efficace ». Plus l’incidence augmente, et plus la portance croît, jusqu’au point 2 où force propulsive est maximum. Lorsque l’on se déplace du point 1 au point 2 la force de dérive augmente ainsi que la trainée (principalement la trainée induite).

Quel est donc le point optimum pour cet angle de vent apparent : β ?

A première vue il semble que le point 2 (présentant la plus grande force propulsive), doive produire la vitesse maximum. Ce n’est pas nécessairement le cas, car au point 2 la force de dérive (et donc la trainée) est plus important qu’au point 1. L’optimum se trouve donc sur la courbe (bleu) entre les points 1 et 2.

Le point de fonctionnement optimum se trouve ainsi proche du point 1 au près serré, et plus proche du point 2 au portant, où la portance est maximale.

3.Hydrodynamique navale:

comment ça marche ?

A) La flotabilité : avant d'avancer, un bateau doit flotter !

Si un bateau flotte, c’est grâce à une force qui est très importante pour l’architecture navale, et qu’on nomme le principe de la Poussée d’Archimède. Selon ce principe « tout corps immergé dans un fluide (liquide ou gaz) reçoit de la part de ce fluide une poussée verticale dirigée de bas en haut et égale à l’intensité du poids du volume de fluide déplacé. »

Ainsi, un corps plongé dans un liquide

  • flotte si la valeur de son poids égale à la valeur de la force de poussée d’Archimède ;

  • coule si la valeur de son poids est supérieure à la valeur de la poussée d’Archimède.

La valeur de la poussée d’Archimède, qu’on peut noter FA, et dont l’unité de mesure est le Newton (N), se calcule par la formule:

FA = r . V . g

Avec :

r est la masse volumique du fluide en kg/m3 (kilogramme par mètre cube) ;

g est l’intensité de la pesanteur en m/s2 ;

V est le volume du fluide déplacé en m3 (mètre cube) ;

 

Pour qu’un bateau flotte, il faut aussi que le centre de poussée C soit au-dessus du centre de gravité G.

Par ailleurs, pour que le bateau soit stable sur l’eau, il faut que C & G soient alignés, faute de quoi le bateau ‘penchera’, jusqu’à dans certains cas se retourner. Quand C & G sont alignés, on parle d’équilibre stable. Plus C & G sont éloignés, plus l’équilibre sera stable : c’est la raison pour laquelle on ajoute une quille lestée sur un bateau. Mais ce n’est pas une solution idéale, car une lourde quille génère aussi une résistance à l’avancement du bateau…

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Sur le schéma ci-contre, deux forces sont représentées. En rouge le vent dans les voiles, qui a tendance à faire giter le bateau, et en bleu la force de rappel de la quille qui a tendance à le redresser. Le bateau atteint sa position de route quand ces deux forces s’équilibrent.

B) Résistance à l'avancement d'un bateau

Pour avancer, un bateau doit affronter une force de résistance hydrodynamique totale (Rh), qui est la résultante de nombreuses forces qui s’opposent à sa progression, ainsi que le poids du volume d’eau qu’il déplace lors de sa progression (auxquels il faut souvent ajouter l’opposition de la houle, du courant et aussi du vent sur ses superstructures non immergées que nous n’étudierons pas ici).

La force de résistance hydrodynamique totale (Rh) a deux composantes principales qui sont :

  • la Résistance Visqueuse (Rv),

  • la Résistance de Vague (Rw).

 

La Résistance Visqueuse (Rv)

La Résistance Visqueuse (Rv), mesurée en Newtons (et parfois appelée Trainée, comme pour la voile !) est la force de résistance qu’exerce un fluide sur un objet lorsque le fluide ou l’objet sont en mouvement l’un par rapport à l’autre. Cette force est parallèle et opposée à la trajectoire du fluide qui est composée de :

  • La résistance de frottement dépendante de la surface de la coque dans l’eau (« la carène ») et de sa rugosité.

  • La résistance de pressions dépendante de la forme de carène et des remous qu'elle génère.

La Résistance de Vague (Rw).

L’avancée du bateau sera également accompagnée d’une résistance due à la création de vagues en surface, dite Résistance de Vague (Rw). La Résistance de vague dépend de la vitesse du bateau et de sa longueur et est fonction du Nombre de Froude (Fr), du nom de William Froude (1810-1878). Cet ingénieur et architecte naval anglais fut l’inventeur du premier bassin de carène pour essai de modèle de coques de bateaux. Incontournable dans l'étude hydrodynamique, le nombre de Froude (Fr) est un nombre sans dimension liant la vitesse(C) en m/sec. et la longueur(L) en mètres du bateau:

Fr = C / √9,81.L

 

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Le nombre de Froude Fn permet ainsi d'évaluer la forme des vagues accompagnant le bateau. Si nous regardons en détail les valeurs remarquables de nombre de Froude et leur impact :​​

- Nombre de Froude inférieur à 0,4 

Aux faibles nombre de Froude (inferieur a 0.26) 3 crêtes de faible hauteur au moins longent le bateau. La résistance de vagues est peu importante et la résistance de frottement représente de 70 à 90 % de la résistance a l'avancement. Au-dessus de 0.26 la résistance de vague augmente et l'interaction entre la vague d'étrave et la vague d'arrière intervient de manière significative sur la résistance à l'avancement.

Le navire engendre principalement 2 trains de vagues:

  • Des vagues d'étrave naissant à l'étrave et dont la hauteur maximum de la première crête se situe à 1/4 de la longueur L,

  • Des vagues d'arrière créées par aspiration de l'arrière du bateau, naissant à l'arrière du bateau et commençant par un creux

- Nombre de Froude égal à 0,4 

La longueur d'onde est la distance horizontale entre les crêtes des deux vagues d’étrave et d’arrière. Cette longueur d'onde augmente avec la vitesse du bateau pour atteindre un maximum équivalent à la longueur de la ligne de flottaison du bateau (longueur de la carène). Dans le cas étudié ici, la vague d'arrière est annulée par la vague d'étrave. C'est la vitesse limite théorique pour laquelle la carène a été dessinée. Le navire navigue dans sa vague, une crête à l'avant, une crête a l'arrière et le creux au milieu. L'augmentation de la vitesse sera accompagné d'une forte augmentation de la résistance de vague.

- Nombre de Froude supérieur à 0,4 

Quand le nombre de Froude est entre entre 0,4 et 0,5, le bateau remonte sur la crête de sa vague d'étrave tandis que le creux se rapproche de l'arrière. La carène bascule et un angle apparaît. C’est la situation la plus défavorable et la plus coûteuse en résistance de vague qui peut atteindre 85 % de la résistance totale à l'avancement. Le navire présente une surface frontale augmentée par l'angle et la courbe de résistance monte en flèche.

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- Nombre de Froude suppérieur à 0,5

Le bateau est sur la crête de vague d'étrave et dégage son avant tout en retrouvant une position horizontale. C'est le domaine des coques « planantes » des bateaux légers sur lesquels une surface plate sur l'arrière est prévue pour prendre appui sur la vague sans l’enfoncer et tenir le maximum de coque hors de l'eau. La resistance de vague diminue fortement.

Pour illustrer toutes ces formules, cela veut dire qu’un bateau qui se déplace sur l’eau produit un système de vagues qui est à l'origine de la résistance à l'avancement et de la vitesse limite. Ce système est produit par le champ de pression autour du bateau et l'énergie des vagues est donnée par la coque du bateau qui avance (cf la 3ème loi de Newton). Ce transfert d'énergie à partir du bateau au système environnant produit la résistance de vague. En bref le bateau fait des jolies vagues pour le wake surf mais ça lui coute de l'énergie et c'est pour ça que c'est cher le wake surf...

Il y a deux types de systèmes de vagues produits par la coque :

  • Un système de vagues divergentes inclinées par rapport à l'axe du bateau

  • Un système de vagues transversales perpendiculaires à l'axe du bateau.

Le système de vagues transversal est l'acteur principale de la résistance de vague aux faibles nombre de Froude. Il est produit par l'étrave (avant du bateau) et la poupe (arrière du bateau). L'interférence entre ces systèmes de vagues génère des creux et des crêtes le long des parois de la coque.  

Quand ils avancent, les bateaux qui ne planent pas (coques dites ‘à déplacement’ par opposition aux coques ‘planantes’) génèrent donc une vague qui va de l’étrave à la poupe et qui, une fois atteinte, limite la vitesse du bateau. Tant qu'on est loin de la vitesse limite, la vitesse du bateau augmente linéairement avec la puissance délivrée par la voile.

En se rapprochant de la vitesse limite, on a beau augmenter la puissance, on ne gagne plus que quelques nœuds et on sent la coque souffrir. Si celle-ci ne peut pas déjauger, elle va quand même essayer de lever le nez et se mettre à pousser de l'eau. Si elle ne peut pas lever le nez, l'arrière va s'enfoncer et toute la coque va pousser de l'eau. On dit que les coques lors de leur déplacement ne peuvent pas aller plus vite que la vague qu’ils génèrent.

Si on veut sortir de cette limite, il faut un surcroît de puissance afin que la coque se mette à monter sur sa vague d’étrave qu’elle arrive à dépasser. On dit qu’elle « déjauge » ou qu’elle « plane ». Ce phénomène amène une grosse dépense d’énergie. Dans le cas d’un voilier, la trajectoire devient peu stable (les voiliers lourds n’arrivent pas à passer ce phénomène) et sur les bateaux à moteur, la consommation est multipliée par un facteur de 6 à 10 en fonction du type de carène.

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Théorie du foil

En mécanique des fluides, un foil ou un hydrofoil est une aile profilée qui se déplace dans l’eau et transmet une force de portance à son support. Comment ça marche ? La vitesse de déplacement génère sur le foil une portance hydrodynamique capable de soulever la coque du bateau, le surf ou la planche de windsurf partiellement ou totalement hors de l’eau. Le but de ce transfert de portance est de réduire le frottement et de réduire la puissance nécessaire à la vitesse.

On sait que sur les bateaux conventionnels la résistance dite de vague entraîne un sillage d'autant plus important que la vitesse est élevée. Sur ces bateaux, la puissance nécessaire croît considérablement lorsque la vitesse augmente. Heureusement l'effet de planning permet de minimiser la puissance mais celle-ci reste cependant considérable aux vitesses élevées. Pour limiter la puissance, une solution intéressante consiste à utiliser la portance de plusieurs ailes similaires aux ailes d'avion pour faire déjauger la coque et s'affranchir de la résistance dite de vague (Rw). Ces ailes, surnommées foils, travaillent alors dans l'eau (parfois entre eau et air pour les ailes de la 1ère génération) et non dans l'air. Comme avec les foils la traînée engendrée est sensiblement indépendante de la vitesse, le gain de puissance est considérable : un dimensionnement correct des foils permet en effet d'obtenir une traînée extrêmement faible qui s'explique par la suppression de la résistance dite de vague (Rw) et par une surface mouillée sans commune mesure avec celle d'une coque au planning diminuant les efforts de frottement. A titre d'exemple, la puissance utile pour atteindre 30 nœuds (environ 15 m/s) avec une embarcation de 300 kg n'est que de 5kw !

Pour les bateaux à voile, l’utilisation de foils se traduit par un travail moindre du gréement aux vitesses élevées et la possibilité d'aller plus vite que le vent: des vitesses supérieures de 50% au vent réel sont envisageables!

 La construction des foils, particulièrement complexe en raison des effets d'échelle sur les grosses embarcations, devient parfaitement envisageable lorsque le poids total en charge est limité à quelques tonnes. De plus, avec les foils entièrement immergés dit de 2ème génération, les couples et les efforts mis en jeu sont environ 5 fois plus faibles comparativement aux foils dits de 1ère génération, ce qui facilite leur construction. En pratique, au-dessus de 30 nœuds la traînée commence à augmenter. La raison principale de cette augmentation est l'effet de décollement de l'écoulement fluide pouvant survenir aux vitesses élevées sur la face supérieure du foil (cavitation sur l'extrados coté bord de fuite). Mais la limitation de vitesse imposée par cette cavitation des foils est de mieux en mieux connue et maîtrisée : elle peut être grandement reculée en choisissant des foils ayant des caractéristiques géométriques (dimension et forme du profil) adaptées au poids en charge et aux vitesses souhaitées. Moins sujet à la cavitation que les foils traversant dits de 1ère génération, les foils immergés de la 2ème génération devraient en toute logique avoir une potentialité de vitesse plus importante.

Les premières apparitions de voiliers à foils stables et bien pensés datent des années 50. Un des 1ers voiliers à foils, le Monitor de 6 mètres seulement de Gordon Baker dépasse dès 1956 la vitesse de 30 nœuds en conservant une bonne stabilité.

En 2009, l’Hydroptère de Alain Thébault atteint 51,36 nœuds sur 500 mètres et pousse une pointe à plus de 55 nœuds (plus de 100 km/h) !

En 2017, les AC45 de la Coupe de l’America évoluent 80% du temps au-dessus de l’eau à plus de 40 nœuds dès que le vent est suffisant.

"En terme de technologie, le bateau de la précédente course était une Citroën DS et là on est plutôt au niveau de l'Aston Martin", analyse pour l'AFP Pierre-Marie Belleau, l'un des responsables d'Airbus Industries, qui est en partenariat avec le defender Oracle Team USA pour cette 35e Coupe.

"La problématique de ces bateaux est d'éviter qu'ils s'envolent, qu'ils sortent trop de l'eau. Il faut les garder au-dessus de l'eau mais pas trop et qu'ils restent à une altitude assez constante", dit pour sa part Guillaume Verdier, architecte naval.

Avec ces nouveaux engins le mode de la voile a rejoint celui de l’aviation, et nous vivons une révolution du monde nautique qui sera scindé entre les « Archimédiens » qui évoluent sur des voiliers à déplacement ou semi-planants et relativement « lents », et les « foilers » en volant au-dessus de la surface de l’eau à haute vitesse.

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